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15 mars 2014 6 15 /03 /mars /2014 11:07

      Des sites d’infos sensationnalistes-minute nous informent que Dieudonné fit partie des Enfoirés, avec un bien-pensisme de petits vieux secouant la tête que je trouve calamiteux, pour ma part. Et pourquoi pas souhaiter une bonne guerre pour nous apprendre la vie, au passage ?

Même si la manière de le faire ne pouvait que l’exposer à ce qui lui arrive, Dieudonné a usé, brut-de-décoffrage, du droit d’expression et de rire de tout un chacun. Malheur, la communauté juive est devenue si sacro-saintement intouchable depuis la deuxième guerre mondiale que les exactions des ultras, qui squattent des collines en territoires occupés et ouvrent de facto la voie à la construction illégale de cités israéliennes, soulèvent surtout des réactions diplomatiques frileuses, comme du bout d'orteils trempés dans une piscine au petit matin d’été. Par contre, un humoriste bien conscient que nul n’est roi au pays des fous se fait fesser en public sur la question d’un délit d’opinion, en somme.

On s’indigne de quoi, exactement, en nous rappelant que ce bronzé truculent faisait partie de la bande des « bons » artistes français ? J’en vois certains branler du chef sur l‘air de « quand on sait ce qu’on sait, quand on voit ce qu’on voit, on a bien raison de penser ce qu’on pense ». Exactement le genre de morale poisseuse qui me hérisse à fond, ça me fait penser au petit bac plastique plein de sirop avec lequel je pourchasse les drosophiles chez moi ces jours – j’ai oublié deux petites bananes canaries dans un coin, du coup, j’ai une nuée d’insectes dans ma cuisine.

 

Ah oui, n’oubliez pas au passage de penser très fort que je suis une inconsciente bilan-carbonique, hein… vous savez, je trie mes déchets comme avant l’introduction de la taxe au sac, ni plus ni moins. Ce terrorisme néo-moral me gonfle supérieurement. Et j’ai d'assez bons appuis du côté d’un vieux pote ingénieur et enseignant en écologie environnementale pour savoir que le bilan-carbone n’est qu’une mesure virtuelle, produisant ici et là assez de culpabilité pour que vous acceptiez de payer une surtaxe chaque fois que vous vous commandez un billet d’avion…

 

Allez allez : je crois que nos indignations se rabattent juste sur des trucs à la mode, et que la morale reste le puissant moteur d’agrégats sociaux qu’elle n’a jamais cessé d’être.

Bon. Le week-end est assez court cette semaine pour que je n’aie pas envie de me gâcher un samedi matin – et puis j’ai pizza avec mon neveu aîné tout-à-l’heure, avant une petite séance d’informatique appliquée. Et crotte, repos.

 

      Que je vous parle plutôt de la rencontre de la semaine : ma frangine m’avait causé, au détour d’une autre pizza, d’une institutrice dynamique du côté de Romainmôtier, qui menait des projets concrets d’insertion sociale avec les gamins dont elle a la charge. Entre autres, elle a organisé pendant une année des visites de sa classe à l’EMS du village voisin, au rythme d’un repas et une après-midi par mois. Les p'tits nains et les vermeilles cherchent le contact, jouent ensemble à des jeux éducatifs pour les uns, et stimulants pour les autres. Le tout a été filmé par le mari de la dame institutrice, ça donne un documentaire de 45’, plein de richesses pour des éducateurs de la petite enfance, des formateurs, bref, pour tous ceux qui cherchent des voies pédagogiques innovantes tellement elles sont simples.

Pendant un bon mois, j’ai cherché à entrer en contact avec le couple auteur du moyen-métrage, histoire de mettre la main sur une bobine de ce film, qui reste hors des circuits de distribution usuels pour des raisons de droits d’auteur d’une part, et d’autre part pour que leur travail ne soit pas galvaudé. On a fini par se voir, j’ai eu droit à une petite projection privée. Cette visite a été un cadeau sur toute la ligne : en échangeant ensuite sur les multiples possibilités d’utiliser leur travail, la confiance s’installait de part et d'autre.

Je suis repartie avec une copie gratuite, sans autre convention, en somme, que d’en faire bon usage… au point que j’ai sorti de mon portefeuille le billet de 100 francs qui m’avait été ristourné chez l’esthéticienne le jour d’avant, alors que je ne m’y attendais pas du tout. Je savais qu’il ne devait pas rester dans ma poche ce billet, je le pressentais, le geste n’était même pas prémédité… d’un coup, vu que le courant passait si bien, et alors que l’on m’offrait si gentiment ce que je convoitais, il est devenu clair que ce billet bleu devait revenir à qui de droit – ces gens ne comptent ni leur temps ni leur argent pour faire passer un message qui percute de plein fouet mes propres convictions : le réseau de la fraternité humaine, d’Erasme à l’aventure fulgurante d’internet, prend tout son sens quand le partage de ressources bouscule la mathématique de base, et que un et un se mettent à faire trois, et même plus.

En partant, on s’est fait la bise, en vrai et en imagination (la dame tenait une crève carabinée, qu’elle souhaitait ne pas me refiler).

Le couple, c’est Yamilé (Mme) et Mica (M.) Arsenijevic. Ils ont également produit deux autres documentaires basés sur le travail avec les gamins ; l’un où les grouillots  apprennent à leurs parents la danse de salon, l’autre où ils tâtent du dessin animé.

Et déjà, allez-y voir ici, pour vous donner envie de ne pas louper une séance s’ils passent à votre portée : http://www.festivalfilmeduc.tv/html/fiche-video.cfm?f=0794.0012.09

 

Et s’il vous prend l’envie d’organiser une séance de visionnage, c’est aussi faisable, nyaka les appeler, ils sont dans le bottin.

 

Le réseau et ses manifestations, c’est marrant quand même : 100 balles offerts en Valais repassent par Lausanne et s’en vont jusqu’aux alentours d’une abbatiale clunisienne, étoffant le fond de caisse d’un projet non-lucratif, mais coûteux en diable. J’aime bien ces clins d’œil des forces en œuvre qui nous dépassent, ça tellure un max’…

 

 

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5 mars 2014 3 05 /03 /mars /2014 18:28

Je rêve d’un temps où on ne ferait pas de foin médiatique quand deux hommes se marient.

Je rêve d’un temps où la Gay Pride ne sera plus une foire exhizibitionniste pour les uns et un spectacle à mater bouche bée pour les autres. Juste un carnaval de la joie de vivre.

 

Je rêve d’un temps où le mot parité deviendrait obsolète au point de devoir en chercher la signification dans le dictionnaire – tout comme aujourd’hui pour l’amour courtois.

 

Je rêve d’un temps où les stéréotypes du nôtre seront si lointains qu’il y aura des spécialistes du XXIe siècle pour expliquer aux jeunes générations les valeurs et préjugés de toutes sortes de notre époque. 

 

D’un autre côté, bien des différences, riches et sympathiques au demeurant, auront disparu. D’autres auront surgi.

Et d’autres ostracismes aussi. Faut pas croire.

Du genre, je sais pas… les enfants élevés par des couples homos… un nouveau genre de SIDA… n’importe quoi qui permettrait aux indigents de l’estime de soi de se la remonter en appuyant sur la tête d’autres personnes.

 

 


Bon, quelque chose de carrément merdeux, à présent : la secrétaire avec laquelle j’étais en froid léger depuis quelques jours s’est effondrée l'autre jour à son cours de fitness, elle n’a pas pu être réanimée. 46 balais, tshaw bonsoir.

Ambiance plombée au boulot, feutrée, plusieurs personnes ont les yeux explosés et sont tout juste fonctionnelles.

Perso, j’ai vécu tant de deuils, de personnes très proches ou pas, que j’ai développé très vite et très fort une spiritualité détachée, digérant les pertes à toute vitesse. Plutôt que d’aller à une cérémonie ou une veillée, j’aime aller à la recherche des traces de ceux qui s’en sont allés. Je fais ainsi mon deuil, en termes de délivrance active, cultivant les traces, les réalisations, les manifestations de l’être disparu.

Alors je suis partie en chasse : ah, la voilà, elle était présidente d’association… originaire d’un pays d’Afrique, elle avait laissé des interventions sur des forums là-bas. A la lire, je rigole, oui, c’est bien cette fille tronchue que je connaissais.

 

Je préfère comme ça.

 

Mon daron a « pris congé » quand j’avais 15 ans, je me suis vite rendue compte que je pleurais sur d’autres choses, que parfois c’était par convenance aussi. On s’attendait à certains comportements de ma part, j’ai comme obéi. Assez rapidement, la pitié des gens m’a parue égoïste, vampirique.

J’avais d'autres soucis à débattre, c'est-à-dire l’ambivalence de notre relation, entre le piédestal sur lequel une ado peut mettre son père et toutes les rancunes que j’avais contre lui, si capable d’injustice : sur son lit de mort pour ainsi dire, il m’avait passé un savon en sentant que mes doigts avaient tenu une cigarette, alors que je lui glissais un sugus au citron sur la langue avec toute ma tendresse. Il ne nous restait guère de temps, quelle connerie de le gâcher.

Il ne savait toujours pas quoi faire de sa jeune paternité, et jusqu’à sa mort à 34 ans, je l’ai senti tiraillé entre la douceur du lien et l’urgence à nous injecter une sorte d'éducation concentrée, pressentant qu’il n’allait pas rester encore longtemps avec nous.

 

Ca a stressé la relation, la configurant en montagnes russes, de manière déchirante et incompréhensible pour la  môme que j’étais. Va mettre de l’ordre dans tout ça, après…

15 ans chez les psys et un saladier plus tard, c’est enfin devenu limpide.

En somme, j’ai pleuré quelqu’un que je me sentais coupable de haïr ici et là.

 

Aujourd’hui je suis en possession non pas d’une carapace ou d’une cuirasse, mais d’une sorte de combinaison isotherme de l’âme qui me permet de plonger fort et profond, très vite, comme une apnéiste. Je médite en cessant de respirer le parfum du chagrin environnant.

 

Ca me convient bien.

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28 février 2014 5 28 /02 /février /2014 08:48

J’aime bien février.

S’il doit faire très froid, c’est là que ça se passe. Il y a deux ans, après deux hivers plutôt doux, passés avec une simple manteau-jaquette en maille, je me caillais cette fois tellement les burettes que je suis partie en ville à la dérupe un samedi du milieu du mois, prête à revenir à la maison avec n’importe quelle hideur pourvu que j’aie chaud.

J’entre dans le premier de mes magasins points de chute - qui propose de plus en plus de sacs informes en guise de « mode féminine pour dames enveloppées ». Chance : mon regard se porte de suite une pelisse argentée qui descend à mi-cuisses, à ma taille, cintrée et jolie en plus. Elle m’attendait, celle-là !

 

J’aime encore plus février depuis ce moment.

 

Mais j’aime bien février pour un tas d’autres raisons : déjà, janvier est passé, et c’est pas rien, les fêtes sont derrière, j’aime pas les fêtes (scoop, ha ha).

Février parle de fièvre, de chaleur, ok je délire, laissez-moi délirer, c’est trop bon.

Les jours sont déjà bien allongés, on ne se lève plus dans la noirceur…

Et puis le long de mon avenue, je vois des grenouilles fluos bottées-casquées - les jardiniers municipaux - qui grimpent aux arbres pour les tailler, juste avant que la sève ne remonte.

Juste avant que la vie se remette à circuler.

 

C’est chic, non ?

 

Et puis, février est vite fini, la paie tombe plus vite aussi, on passe à mars, il n’y a plus qu’à attendre gentiment avril et Pâques… les magnolias qui tulipent à fond les ballons, les lilas qui commencent à faire popcorn. Plop.

En somme, on va vers l’été.

La saison où je peux râler que j’ai trop chaud.

 

Février, gentil février.

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17 février 2014 1 17 /02 /février /2014 11:54

 

Les champs morphogénétiques, ça vous dit quelque chose ?

Une théorie scientifique non-validée qui pose que les êtres découvrent de nouvelles voies, de nouvelles idées, par résonance… « spirituelle », enfin, pas au sens religieux, zutre, je m’empêtre, attends, je donne un exemple : sur une île, deux tribus de singes vivent sans jamais se rencontrer. Dans une des tribus, une vieille femelle maligne se rend compte que ses patates douces lavées à l’eau de mer sont plus savoureuses. Et une semaine plus tard, toute l’autre tribu, en plus de la sienne, pratique le lavage des tubercules.

 

Tiens, un peu de documentation : http://fr.wikipedia.org/wiki/Champ_morphog%C3%A9n%C3%A9tique

 

Tout ça pour dire que très souvent, il m’arrive de tomber sur de multiples sources et sans les avoir sollicités, des renseignements au sujet du même thème, et que je suis comme forcée de m’y intéresser – alors je creuse, et tout-à-coup, j’ai comme une ampoule qui s’allume dans la tête au sujet d’un phénomène X. Très souvent, c’est dans le domaine des comportements pénibles ou réputés tels, que j’observe chez moi et mes semblables. Donc c’est assez cool dans le fond, car la compréhension appelle la mansuétude – pas le pardon intégral, hein, faut pas se gourer de cible. Mais dans l’idée que si l’on comprend d’où vient une attitude, alors ça devient possible de la modifier. Ou d’offrir autre chose qu’un cadrage pour que quelqu’un qui nous dérange cesse de le faire.

 

Je bosse comme formatrice, avec des personnes qui pour la plupart redoutent les évaluations, et à l’âge adulte continuent de se comporter comme des mômes pris en faute. C’est pas fastoche d’arriver à faire percevoir ses erreurs comme des sources d’amélioration, et pourtant je ne vois pas d’autre voie possible pour déculpabiliser et s’améliorer.

En plus de ça, je forme dans un domaine où la hiérarchie est très forte, en même temps que les gens qui y bossent ont le bisounours sur la main… alors la vie dans les soins peut broyer sans pitié un petit cœur tout mou tout tendre.

Du coup, il y a tout le temps des occasions de se rendre compte qu’on peut se foutre dans des merdes relationnelles assez cossues, en voulant rester bienveillant et serviable. Et que si l’on cherche la justice à tout prix, c’est beau, chevaleresque, romantique, mais ça peut faire perdre un boulot, la confiance des co-équipiers et j’en passe et des très moches.

Plutôt que la justice, chercher la justesse, celle du compromis, se tenir en équilibre là au milieu, prendre la mesure du moindre mal.

Tu sais, jouer les Don Quichotte est le privilège de ceux qui n’ont plus rien à perdre tellement ils n’ont rien, déjà ; ou alors, de ceux qui ont tellement d’indépendance financière qu’ils peuvent se la jouer Batman. D’ailleurs, parmi tous les super-héros de BD, c’est marrant comme ils ont tous largement de quoi se consacrer à autre chose qu’à un boulot qui permet de vivre... Largo Winch, tiens, pour ne parler que de çui-là.

Il n’y a guère que Superman qui bosse, dans le tas. Mais double vie il peut mener, puisque seul un fragment de kryptonite peut lui dévier la raie.

 

Bon, j’en étais où, moi ?

 

Les champs morphogénétiques, et j’y reviens. La dernière fois que ça m’a fait le coup, c’est sur le thème de l’autisme.

Je vais vous la faire en super-raccourci.

Je côtoie quelques familles où je vois des fratries faites d’un surdoué, et d’un asperger ( la manifestation de l’autisme la moins « grave », tiens voilà de quoi lire : http://fr.wikipedia.org/wiki/Asperger)

Les asperger de ces duos présentent par ailleurs des facultés intellectuelles focalisées sur un domaine bien particulier, et doivent vachement bosser leurs interactions sociales pour décoder le fonctionnement de la majorité des gens.

C’est comme si tous les jours, toutes les minutes, la mémoire relationnelle se remettait à zéro : les expressions du visage, les plaisanteries, ça leur parle pas. Et quand on ne comprend pas, on se met en porte-à-faux : j’en connais un qui réagissait avec violence aux maltraitances involontaires de ses camarades, et un autre qui ne captait pas la subtilité d’un exercice consistant à colorier tout un dessin de sapin en vert – le tronc est brun, point à la ligne, donc il le colorie en brun, et n’en démord point. Fuck la consigne, ça le met hors de lui à la fin, car l'asperger ne sait pas mentir ou dire juste une partie de la vérité, donc il fonctionne avec la vérité: le tronc d'un sapin est brun, è basta.

 

Idée suivante, il y a DES autismes, et pas un seul autisme. Chacun son propre spectre de manifestations d’un cerveau neuro-atypique… c’est pour ça qu’il n’a pas une seule manière d’aborder les personnes autistes, mais une fouletitude de prises en charge. Aga là, et t’auras une idée de tout ce que des gens divers et soucieux de nouer un lien avec un autiste qui leur est cher ont tenté de cerner : http://www.lecubedeverre.ch/index.php?option=com_content&view=article&id=66&Itemid=69

 

On sait qu’être autiste n’est pas synonyme d’être bête : certains aspergers sont des calculateurs de génie.

Alors l’intelligence, ce que c’est… c’est aussi difficile à définir que l’autisme. En très gros, je dirais que c’est la capacité à l'empathie, et à s’adapter, en comprenant les relations entre les gens, les objets, la réalité et les règles universelles. A tirer des enseignements des événements, à pouvoir conceptualiser des principes à partir de diverses données. Donc, à les appliquer à de nouveaux champs de réflexion.

Ce qui veut dire, quelque part, de quitter la peur de la parole ou de l’acte socialement incorrect. On devrait pouvoir y arriver, vu qu’on n’est plus au temps de Galilée. On devrait... pas besoin, malheureusement, de vivre en état totalitaire pour se faire étriller. N'est-ce pas, Dieudonné?

Côté séries américaines, j’ai bien croché avec « Dr House », celui qu’on adore détester. Morte de rire. Mon frangin en pensée. Pas loin je suis, parfois, de son âpreté.

Ce personnage ose simplement dire ce qu'il pense, sans souci de choquer. Le dernier degré de la censure, et le plus insidieux survient quand un individu a si bien intégré ce qui se dit et se fait versus ce qui ne se dit pas et ne se fait pas, que sa police interne le tient bien ficelé.

 

Il faut de la merde pour bien faire pousser l’herbe, alors pourquoi mépriser la merde, surtout qu’elle sort de notre derrière…

Et outre le pouvoir libérateur du cynisme, souvent c’est en lâchant des incongruités que j’ai ouvert quelques portes dans mon esprit. Bon, il y a d’autres clés à avoir dans son trousseau, comme de se ficher pas mal des mesquines indignations bien-pensantes. C’est du boulot, claro que si.

Si on se foutait tous des codes de bienséance, la vie serait vachement plus riche. Mais peut-être beaucoup plus précaire.

 

On protège et on intègre de plus en plus les neuro-déviants, leur qualité de vie s’améliore… tiens, j’ai une vision du futur, là… et si un jour on se retrouvait avec plus de neuro-atypiques que de gens moralement bien intégrés sur Terre, si la prochaine mutation du genre humain était celle-là, l’émergence de l’homo neuro-atypicus, si cet avatar trouvait un équilibre qui lui permette de rester en cohésion sociale sans morale castratrice, libre de réinventer des liens sociaux sans se mettre en danger – vu que les règles ont quand même comme but la préservation du groupe social, donc éradiquent les comportements susceptibles de faire éclater cette cohésion, en les punissant et les stigmatisant.

 

On réinventerait l'homme, carrément.

Va savoir… mais va savoir. 

 

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16 février 2014 7 16 /02 /février /2014 14:21

Je mange des dattes.

Chébon, les dattes.

Celles-là sont de taille respectable, plus grosses que les deux phalanges de mon pouce.

Bon d’accord, j’ai pas des battoirs, mais des mimines fines, avec des ongles un peu longs, ovales, je les soigne, c’est Djess qui me les fait : sobre, élégant.

Mais c’est des grosses dattes quand même, des medjouls. Elles attendaient depuis un moment, les petites chéries. Délicieuses.

 

C’est dimanche, je suis heureuse, les projets persos vont bien… l’écrivain public écrit, le site et mon association vont bien, on donne notre premier cours dans deux semaines. J’ai trouvé une salle tout près de chez moi, une bonne ressource… je vais inviter à ce premier cours deux collègues avec lesquelles le courant passe bien, j’espère qu’elles vont pouvoir se libérer.

C’est comme si tout s’emboîtait comme des poupées russes, ça me console largement des trucs qui me font grincer des dents au taf – par exemple la mauvaise foi de la secrétaire de desk qui ayant dûment constaté qu’elle ne pouvait ouvrir une salle de cours, prétend que c’est moi qui ai découvert en premier que la serrure ne répondait pas, donc qu’il m’incombe de faire la démarche de demande de réparation. Le genre de truc à ranger dans « Consternants et Cie ». Comme les calculs mesquins sur le décompte des heures de "bénévolat contractuel", de même que cette dénomination faux-cul et qui ne tient pas la route…

 

Brèfle !

Je finalise ces jours la signature de mon contrat de chargée de cours en milieu HES… je vais faire ce que j’aime, avec un vieux bon pote, et pas pour des clopinettes, voyez-vous.

Le Zorro continue de se battre avec le chat du voisin, il est plein de croûtes. Faut dire que l’autre tache, qui ne fait pas le poids, continue à le chercher. Je sens quand Zorro lutte avec une infection, il vient se pelotonner contre moi pendant quelques temps après un petit discours de plainte le jour de son altercation. Cette fois, il est venu me tenir conférence pendant que je me baquais à la lotion pour bébé, ce taciturne de nature barjaquait de manière insistante, comme indignée, perché sur le couvercle des véssés. Donc ces jours, c’est grôcâlin avec mon katz en smoking, j’apprécie aussi.

 

Et puis je viens de poser le téléphone, j’avais pas revu Catherine depuis trop longtemps, alors on va se poser rendez-vous, il y une fondue qui m’attend à Bienne. Sa petite famille recomposée, son mec aussi gentiment déjanté qu’elle. On se connaît depuis une douzaine d’années, depuis les fouilles sur le plateau de Bevaix. Je me souviens d’un lundi matin après une foire du diable le week-end ; je l’avais encouragée à roupiller un moment sur le bord de la tranchés, on était sous tente, le chef ne pouvait rien voir, je l’avertissais quand on l’entendait arriver… On se tirait des photos débiles en singeant Laocoon et les serpents, à l’aide des cordes de tente ; ou en posant la tête à ras le fossé avec une atroce grimace de gorgone.

 

La fête, quoi.

J’ai de nouveau bien envie de me faire des bons petits plats : il me reste au frigo de la soupe au potiron façon thaï (citronnelle, feuilles de citronnier, galanga, coriandre, sauce soja et nuoc-mam, lait de coco, jambon fumé, bouillon, sauce piments) et de la gratinée à l’oignon. Et j’ai de quoi me concocter du jambon au madère sur lit de riz blanc…

 

2014 s’annonce bien… il fait bon vivre.

Ca vous change de mes râleries habituelles, hein?   

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13 février 2014 4 13 /02 /février /2014 15:47

Pour pouvoir présenter mon dossier à l’organisme responsable de valider mes acquis de formatrice d’adultes, je dois participer à un groupe de supervision accompagné par un psychologue dûment mandaté.

 

18 heures, je dois faire. 6 après-midis, quoi, entre septembre dernier et mai qui vient. 

Et je me suis démenée comme une diablesse pour trouver un groupe idoine : entre le moment où je me suis mise en chasse et la première séance, 10 mois ont passé. Faut vouloir...

Bref, j’y suis, j’y reste.

Le psy est un Père Noël latino bonnasse et plein d’humour, et mes coéquipiers viennent d’horizons de formation si différents que cette presque corvée qui me coûte un bras s’est transformée en un moment assez agréable.

Surtout hier : tour à tour, chacun présente une situation vécue, en principe source de problèmes.

Déjà, et de un, comme il dit Julio-Père Noël, faut pas confondre problématique et problème. Un questionnement n’est pas forcément un problème. J’apprécie hautement, vu que je bosse dans un milieu qui forme principalement à la relation, lieu de toutes les présentations de factures émotionnelles, de tous les triangles infernaux dits de Karpman, et j’en passe, et des poivronées. Oh que si.

Hier, le gars qui présentait sa problématique a dit en préambule que son « problème », c’était qu’en 28 ans de boîte à 6 postes différents, et même comme formateur, de problèmes il n’avait jamais eu.

De fil en aiguille, on a comparé avec ma propre problématique d’experte aux examens pratiques de soignants ; problématique touffue, douloureuse, avec des chômeurs ou des étrangers en situation de « ça passe ou ça casse » - des gens qui adressent des lettres de plainte parfois au simple motif que l’expert a respiré profondément à un moment donné, ou a fait les cent pas (rester 60’ immobile, c’est un sacré défi…).

Il est formateur en mécanique, accueille des gens du monde entier venus apprendre les bases du dépannage sur machine. Il forme à des tâches précises, gratifiantes, des personnes hyper-motivées et triées sur le volet, sans devoir donner ensuite d’évaluation, ni signifier de réussite ou d’échec. Les participants repartent chez eux après une semaine de stage, avec des compétences transférables.

 

Voilà les clés de sa grande paix… Moi je nage dans un milieu qui ressemble à une fourmilière, où chaque chose que je dis peut être interprétée de travers… et ben ça me fait un vieux bien d’apprendre qu’on peut bosser tranquille. Chuis contente pour lui.

C’est une tradition de la corporation infirmière, quelque part, de voir le taf en termes de problèmes. Normal, puisque les gens arrivent auprès de nous avec… un problème. Encore heureux si y en a qu'un.

Et puis l’altruisme, hein… vous savez ce que j’en pense. Un milieu qui a l’ego et ses avatars tellement en horreur que même le bon sens qui fait qu’il faut veiller à sa propre santé pour pouvoir s’occuper de celle des autres est difficile à intégrer.

 

 

Dans le groupe, il y a un ancien pasteur, et ça m’a aussi fait un autre vieux bien de l‘entendre m’emboîter le pas sur les méfaits de la bienveillance quand elle signifie « priver les gens de la possibilité de devenir autonomes ». Et parler des abus de pouvoir potentiels et avérés de ceux qui pensent être des gens de bien parce qu’ils exercent une activité moralement valorisée par le groupe social. C’te carte de visite qu’on se trimballe, les altruistes… un vrai bristol. Tellement encombrante qu’on se prend fastoche les pieds dans le tapis.

 

Bref… un chic moment, c'te supervision d'hier. Et puis les autres qui soit avaient voulu une fois ou l’autre devenir soignant, soit travaillent dans des domaines proches, sont repartis avec leur corbillon plein de questionnements. Tiens donc. Moi j'ai posé un poids, un gros.

 

Bon. Sinon j’ai de la fièvre et les genoux en coton, alors un Néocitran et aux plumes. Zou.

 

Cordonnier bien chaussé, na.

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29 janvier 2014 3 29 /01 /janvier /2014 08:57

 

Ch’suis perplexe.

Encore une fois, envie de quitter mon job malgré les nombreux avantages annexes qu’il me procure (grosse économie de temps, et moyennant quelques stratégies savoureuses à mettre en place, protéger mon bastion comme Fort Knox).

A la faveur du non-respect d’un protocole de bouclage de dossier, et au foutoir généré par la panique d’une collaboratrice qui ne sait plus pourquoi on fait les choses dans un certain ordre (comme équivalence, j’ai l’image suivante : crémer les fesses du poupon avant de nettoyer la m…, vous voyez l’idée ?), j’ai la nette impression que se met solidement en place un syndicat de protection des conneries administratives, doublé d’une ordonnance posant comme acquis qu’une certaine partie du personnel est insuffisante humainement parlant… cette partie du personnel-là prenant en charge, humainement, environ 200 personnes par année pour les conduire au marché du travail. Si on était si nuls que ça, on le saurait… Sans déc’, ça frise le grotesque.

Au cul les Batman qui ne se résolvent pas à mettre à la porte des gens supposés maîtriser les outils informatiques, qui au lieu de chercher pourquoi un disque ne peut être gravé, réputent simplement l’opération impossible. Jusqu’au jour où un brave couillon d’informaticien qui passait par là s’aperçoit que les disques vierges achetés ne sont pas assez gros pour enregistrer la masse d’infos… Autre épisode grinçant : incapable de retrouver un document dans son PC, tellement c’est le foutoir, la personne en question a été sortie de sa place de travail le temps que la personne qu’elle seconde retrouve elle-même le document en question…

Et marre aussi des paumés qu’on maintient en place sous divers prétextes : une autre pauvre chérie s’est fait poser par le père de son enfant – moi j’aimerais qu’on m’explique comment la personne en question a cru simplement pouvoir se passer d’informer sa supérieure hiérarchique qu’elle partait se reposer une semaine ailleurs, et sans certificat médical. Se reposer. Ça va les dents, ou bien quoi ?

 

Je vous mets en garde encore une fois contre les associations humanitaires si préoccupées du sort des « pauvres gens » qu’elles sont censées servir, que leur condescendance va jusqu’à maintenir à des postes-clés des gens mal formés ou sans organisation personnelle. Indirectement, ça ouvre la porte à la maltraitance de ceux qui doivent rattraper encore et encore les bourdes. On est juste le cran au-dessus du bénévolat des dames de la bonne société lausannoise, qui du fric plein les poches confondent « carrière » et « obligation de travailler selon les exigences d’un patron ».

Avoir le choix, Madame, ne fait pas partie de la dot de l’immense majorité des gens.

Après ça on va se passer la brosse à reluire en allant vendre sur la rue au prix fort trois brins de fleurs pour procurer des vacances à des schtroumpfs du quart-monde. Ha ke Ahnig – ch’komm-prends pas, merci Steff-la-cheffe pour ce refrain dont je ne me lasse pas. http://vimeo.com/62283094 

 

J’m’arrange pour me rattraper ailleurs, faut pas croire. Je pense que je suis au cap de Bonne-Espérance, là. Plus attendre la bonne occase, mais la créer, la forcer. Foncer vers les mers chaudes, la passion de partager un savoir et un savoir-faire, de pousser les gens vers l’autonomie.

J’y travaille. On bosse avec mon pote-de-fondue pour mettre sur pied le cours HES de soutien aux diplômants. Ça commence petit, mais je vais pas râler, Rome et le monde, ça a pris plus qu’une semaine. Et en plus d’être intéressant, fertile, gratifiant, ça me fait respirer plus à l’aise : avoir deux jours par semaine pour souffler, et deux autres pour bosser au relais à mettre en place, c’est rêvé. Je suis plus habituée aux virages à la corde pour économiser le carburant, aux épisodes un peu limites avec deux mandats à mener en parallèle, les cernes jusqu'au milieu des joues… De plus, pendant un des deux jours, je gagne l’équivalent de deux jours de boulot salariés, alors je m’estime chanceuse. Méritante aussi, ça m’est pas tombé tout cuit dans le bec.

Mébon, ceci dit, si je gagnais à la Loterie, j’oublierais pas d’aller montrer mon ticket…

 

 

 

 

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14 janvier 2014 2 14 /01 /janvier /2014 17:22

 

Ou alors je me dégote une martingale infaillible pour gagner à l’Europognon.

Ou alors, je me SDF-ise.

 

C’est cool, j’ai quand même pas mal de possibilités d’échapper à un boulot qui commence à me donner des démangeaisons.

C’est pas ce que je fais qui m’embête, ça, ce serait plutôt le côté nourrissant ; ça et une certaine liberté de m’organiser, de jouer avec le cadre.

Et comme jusqu’ici je me suis toujours offert le luxe de changer de taf quand je commençais à avoir la peau qui tire, je pourrais encore continuer.

Mais je crois bien être arrivée au maximum du confort que je pouvais regagner avec un diplôme d’infirmière.

 

Déjà que je ne bosse plus le week-end, ni le soir, ni la nuit. Déjà que je ne bosse plus en uniforme. Déjà que je ne fais plus de soins dégoûtants. Déjà que je peux travailler à 70% vu que mes annuités me le permettent.

Il me reste un caillou-dans-la-pompe mal définissable, dont je ne peux me défaire ; comme une porte qui grince, mal dans ses gonds.

 

Et puis cette nette impression que l’on joue au plus con avec moi.

J’ai décidé de laisser gagner, tiens.

 

Millepertuis m’aide bien : je ne fais plus que constater, au lieu de m’énerver. Au prix d’un p’tit coup de gueule comme celui-ci, tout de même.

Ça m’aidera à tenir les dix dernières années, les dix prochaines. Au lieu de partir encore… car selon mon schéma habituel, si je continue comme jusqu’ici, j’ai encore 3 postes de travail à traverser avec pertes et fracas.

Le reste va bien, merci. C’est varié, rafraîchissant. Une vraie salade composée d’été.

 

Y’a pas à dire quand même, l’aisance matérielle permet d’éviter pas mal d’écueils. Pouvoir juste poser sa dém’, sans se ronger les ongles pour trouver un autre job, c’est jouissif. J’ai déjà fait, quand les agences intérimaires ont commencé à courir derrière les infirmières pour recruter. Mais sans pouvoir m’autoriser de pause, ce que permet le fait d’être nanti.

Le jour venu, je ferai, comme on dit, « valoir mes droits à la caisse de pension ». Et demanderai fermement à ne pas avoir de verrée de départ, ni de cadeau, ni de fleurs. Je prendrai moi-même en charge un brunch à ma manière, quitte à  ne pas m’y présenter, nul n’est à l’abri d’un pépin de dernière minute. Si si, j’en suis capable…

Il sera bon, que je le cuisine ou que je le fasse faire… non non, je n’y mettrai pas de verre pilé, ni de souche bactérienne capable de décimer l’équipe.

Crachis, Jura.

 

Juste là, je m’en fous, ce soir je m’appuie une fondue avec mon yeupote Dominique ; à 16 00 j’avais déjà les crocs, alors je me réserve, je devrais pouvoir finir ma part ce coup-là – d’habitude, je cale avant la religieuse…

On va causer aussi de ma salade composée, le projet qu’on monte ensemble en fait partie.

 

Et puis, aussi, râler un peu, nous faire part de nos bonnes non-résolutions. Sans blague, pas la peine de se faire du mal en les abandonnant, alors prévenons le problème, n’en prenons pas.

 

Compter nos bobos, nos plaques d’urticaire, échanger nos trucs et nos astuces. Mal dormir à cause du vin blanc.

 

Remettre la compresse demain, en arrivant au boulot tranquillou vers les 9 00 puisque j’organise mes journées comme je l’entends, et que quitte à travailler 28 h par semaine, autant ne faire que 4 x 7 h ; car charité bien ordonnée commence par soi-même et un égoïste, c’est quelqu’un qui ne pense pas à moi.

     

Na-na nère.

 

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3 janvier 2014 5 03 /01 /janvier /2014 11:45

 

Décidément, un rien m’amuse. Ou me gonfle, c'est selon.

Je vous fais grâce du cheminement de pensée complet qui m’amène à pondre cet article… je vous brosse juste un petit tableau du contexte.

J’ai 3 neveux entre 20 et 30 ans, qui tous ont choisi une voie professionnelle basée essentiellement sur l’outil informatique : un développeur/designer, un photographe et un graphiste.

Si un jour le net disparaît, ils se trouveront sans travail… Et si la technologie continue à progresser en flèche, chaque jour deviendra une ultra-compétition pour se tenir à jour...

 

Je bosse avec mon associée à mettre en ligne le site où nous proposons des formations continues pour formateurs et enseignants; j’ai 53 ans et de bonnes bases informatiques (relativement, hein…) qui me facilitent les choses. Car l’aîné me file de gracieux coups de pouce pour déboguer rapido les erreurs de programmation. Je veux dire... il m'explique et je me débrouille ensuite. On a sa fierté, merdenfin.

Ce qui fait que nous pouvons charogner de concert sur le temps et l’énergie de ouf que peut prendre la recherche de LA virgule qui fiche par terre une page entière d’encodage. Migraine assurée, et on se comprend malgré notre quart de siècle de différence.

J’ai dû apprendre la logique informatique en suant sang et eau, alors que rien ne m’y obligeait vraiment, sauf la poursuite d’un bachelor en information documentaire. Ayant fortement mésestimé combien ce cursus s’appuyait sur le maniement de l’ordinateur, bien au-delà de ce que je pensais nécessaire, j’en ai chié pour rattraper mon retard.

Mettons que j’en ai même attrapé la courante, de ce point de vue. Ma foi, à débarquer en terre inconnue, c’était logique de choper la tourista.

Brèfle.

 

Je suis allée voir sur Wikipedia ce que l’article « fracture numérique » recelait aujourd’hui, vu que ça change tout le temps, puisque tout le monde peut s’en mêler. J’ai beau être une quinqua papable pour être ultra-méfiante face à la nouvelle donne, je sais que pour signer un traité de paix il faut s’approcher de l’ennemi et comprendre son système de pensée. Des fois, ça devient même un allié, ouaille note. 

Et là, je tombe sur les notions de « natif numérique » et d’ « immigrant numérique ». Ah ouaip je me dis, ça le fait, rien que ça; mais aussi le développement de l'article ensuite.

Mes neveux, natifs numériques, sont nés avec la souris dans la main, je me rappelle d’eux devant la tourelle Apple, jouant avec les distractions offertes à l’époque : la transcription de jeux réels, image par image et en noir-blanc  . Je vous parle d’un temps où un ordinateur de ménage coûtait 17 000 CHF, alors que de nos jours, avec quelques centaines de francs on peut s’équiper d’un matos aux performances multipliées à puissance 1000. Et encore, je dois être loin de la vérité... après tout, je ne suis qu'une immigrante. 

 

Tiens, au passage, je me souviens bien aussi de ce que me disait le prof d’informatique pendant mon cursus vers le bachelor : que les engins devenaient désuets au bout d’une année, et même de six mois, pensait-on. C’était en 2004.

Dix ans plus tard, les médias sont quotidiennement inondés de l’annonce de la sortie d’une nouvelle application quand c'est pas deux ou plus. On n'a pas fini de rire, à présent tu peux « vivre » la BD que tu lis, et sur un machin de la taille d’un paquet de clopes, te faire évaluer la beauté en ligne. Plus utilement, te faire opérer à distance par un robot qui reproduit les gestes du chirurgien qui est de l’autre côté de la planète. Ou créer une prothèse de hanche parfaitement adaptée à une anatomie donnée, avec la conception assistée par ordi (la CAO) - à cette heure on dispose de pas moins de trois méthodes différentes pour ça. Tu verses à l'équerre, comme on disait quand j'avais 20 ans. Je vais attendre un peu pour me faire opérer, moi, je crois; et disposer d'un machin dernier cri pour remplacer mon cartilage bouffé aux mites à la hanche droite. Désuet dès le lendemain de mon passage sur le billard, en plus. 

Et j’imagine bien que le nouveau cœur artificiel qui pèse juste un kilo sera remplacé rapidement par une pompe qui aura l’air d’un vrai palpitant; quand l'impression en 3D se fera avec du matériau "intelligent"...

 

Je reviens à l’article sur la fracture numérique. Ça m’a laissée songeuse, je dois dire. Visez plutôt http://fr.wikipedia.org/wiki/Fracture_num%C3%A9rique_(g%C3%A9n%C3%A9rationnelle 

 

Alors que les vioques comme moi seraient interloqués par la gratuité du réseau, donc méfiants, les djeunes trouveeraient ça normal…

Mouais. Gratuit, faut voir. Je dois consacrer annuellement environ la moitié d’un salaire mensuel juste pour disposer d’un équipement de base… et je m’effare de voir des connaissances se ruer sur la moindre nouveauté, ce qui coûte au final des saladiers en platine. Mes neveux, pour bosser, ne pourront faire l’impasse sur la surenchère. Mécolles, je résiste en montrant les dents au smartphone, j’y trouve rien de smart, juste la perspective d’être constamment disponible, sollicitée, en un mot, emmerdable partout et tout le temps. Ben ça doit être générationnel en effet: mon neveu débogueur s'excuse platement quand il ne m'a pas répondu dans les 5'...  Woh l'aut', respire.

Pour le truc de gérer ses rapports sociaux, de protéger sa vie privée, si ça marchait si bien pour les djeunes que le dit le bouquin auquel il est fait référence dans l’article et la rubrique correspondante, je ne pense pas qu’on aurait le moindre cas de harcèlement ou de discrédit total d'adolescents comme il en sort régulièrement dans la presse, suicides à l’appui…

La propriété intellectuelle doit aussi être réexplorée, claro. Les montages vidéos divers regorgent de possibilités de procès pour violation des droits d’auteur, avis aux avocats qui cherchent un nouveau créneau à exploiter…

Par contre, je suis d’accord que le net stimule la créativité, le réseautage, le partage, j’en suis le premier exemple ici ! Et que le pouvoir se partage à la mesure de la circulation de l’information, des buzzes, des taclages des personnalités politiques qui se font épingler plus vite et plus fort quand ils profèrent ou commettent de grosses conneries.

Bref, quelque part il n’y a plus qu’à attendre que la génération des immigrants numériques dont je suis disparaisse… hé les djeunes, je me demande à quel clivage vous aurez affaire quand vous aurez doublé ou triplé le nombre de bougies sur le gâteau d’anniversaire.

On risque de rigoler.

Chaque génération a ses vieux et ses jeunes cons… j'avais peur de vieillir dans la tête pour le coup, mais là, je commence à aimer prendre de l'âge. 

 

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2 janvier 2014 4 02 /01 /janvier /2014 12:36

 

Encore un de ces faux jours de congé, imposé par la coutume qui veut que l’on se repose des bombances des derniers dix jours. Qué bombances? 

Mézigues, je me repose de 6 semaines de congé – pour être exacte, 2 de vacances et 4 de repos pour un syndrome douloureux des trapèzes, une bonne somatisation après 16 mois de travail salarié plein de changements prévus et d’imprévus sournois qui ont miné mes forces de manière souterraine.

On se remet, on se prépare à reprendre le collier en ayant blindé les sécurités. Pas sur les imprévus, ça, ce serait possible si l’on était la Pythie... et justement, faut se garder de la marge pour les accueillir, ceux-là. 

En même temps que j’ai encaissé les durailleries, j’ai préparé quelques factures à présenter à l’entité patronale. La première étant, il faut le dire, ce mois d’arrêt-maladie, pour solde de 2013. Les suivantes, comme des acomptes provisionnels pour 2014. Les retours de kicks, ça doit servir de leçon : si l’on n'apprenait pas à se tenir hors de portée quand ils vous ont pliée de douleur et fait quelques creux dans la continuité de l’os qu’on sent encore bien en passant le doigt sur la crête du tibia, à quoi serviraient-ils ?

A chaque rentrée académique, en septembre, je compare la faisabilité des stratégies imaginées pour me tenir hors de portée des programmes merdiques imaginés par ma hiérarchie. J’en avais pourtant pas vu venir le réel impact à la rentrée 2012, donc 2013 a été calamiteux du point de vue de la prévention des risques. Et la rentrée 2013 a été placée sous le signe d’une sensation de monter à l’échafaud, qui s’est soldée par un torticolis sévère, si gentiment installé que je me suis laissée berner par ce signe    inhabituel : d’habitude, c’est mon carré des lombes qui geint, et je suis tellement familière de ses avertissements que mes épaules bloquées n’ont pas vraiment réussi à  attirer mon attention.

Donc j’active les mesures de prévention primaire, pour ne pas avoir à réguler les retombées de la prévention secondaire avec un nouvel arrêt prolongé. Ça me semble hautement raisonnable…

La vigilance s’impose : après avoir concocté un agenda qui me garantira la marge que j’avais toujours réussi à créer (depuis un dernier burn-out il y a 15 ans, doublé d’une période de réorientation professionnelle plutôt craignos je dois dire), il faut que je surveille mes arrières, tout de même. 

Je connais assez bien maintenant la tendance de ma responsable à utiliser l’Outlook pour repérer la seule personne disponible sur-le-champ, candidate à lâcher une journée d’administration pour remplacer au pied levé une collègue malade. Ceci sans proposer immédiatement de contrepartie réelle, comme défrayer le travailleur – le rattrapage en heures supp’ étant laissé hasardeusement à ses propres soins.

Pour que ce soit moins évident de m'épingler en corvée de sauvetage, je ne prévois plus de journée entièrement consacrée aux dossiers, et me pose des rendez-vous téléphoniques, histoire de compliquer tout changement; je fais la morte quand on m'appelle du boulot à mon domicile en-dehors de mes jours ou mes heures de travail, et j'ai en réserve quelques réponses toutes faites au sujet d'un certain portable qui a tendance à tomber en panne de batterie, ou un opérateur qui ne transmet les messages qu'avec 24h de retard (que du vrai, à part ça)... histoire de laisser se tordre le cou toutes seules à certaines exigences, irrecevables à moins que je sois défrayée pour l'achat d'un smartphone et les heures de piquet.

De plus je laisse régner tout au long de mon agenda informatique un certain flou sur la place d'une demi-journée par semaine. Celle qui m’est nécessaire pour reprendre mon souffle et accomplir les tâches liées à mon cahier des charges, qu’elles soient immédiates ou se présentent ensuite au guichet. Ce sera la plupart du temps sous la forme des difficultés personnelles d’apprenants en dette avec leur passé, projetées sur la relation avec le formateur. 

Les pénibilités liées à ce poste de formatrice sont en effet de l’ordre de la gestion prudente des liens mis en place avec une population chômeuse pour moitié, et prise à la gorge pour se réinsérer socialement et professionnellement. Car quand le projet foire, le formateur est tout désigné pour devenir le salaud de service qui empêche le chômeur de trouver du boulot avant la fin de son délai-cadre...  voire l'oblige à regagner un pays en guerre. D'autres instances prendront le relais, qu'on se le dise.

 

 

Et dans le domaine des soins, former du monde comporte une énorme part de culture du savoir-être dans la prise en charge de bénéficiaires vulnérables, très âgés.

Il y a longtemps que je me débats avec le faux-culisme de l’altruisme : par an, je vois en entretien de candidature environ 35 personnes souhaitant devenir auxiliaires de santé certifiées, je commence à bien renifler l’odeur de roussi quand quelqu’un me cite comme motivation le désir d’aider son prochain, que ce soit en parlant ouvertement de sa foi ou en évoquant un passé consacré à s’occuper de sa famille. On fait pas un bon soignant avec de bons sentiments. Et les dettes émotionnelles contractées en dealant tous les jours une relation mi-amour mi-haine, ça fait tache dans le paysage.

Un exemple bien frappé : la fille qui s’effondre en larmes pendant l’entrevue, donc à l’évidence ne présente pas un profil assez pacifié pour entrer en formation. Mise devant la nécessité de retourner en pré-stage quelques mois pour apprendre à réguler la distance émotionnelle devant le malheur d’autrui, réel ou qu'elle lui projette dessus, ceci couplé avec le cadrage nécessaire pour que l’entretien ne se transforme pas en séance de psychothérapie gratuite, ça a donné une lettre de 5 pages, pas moins, pour se plaindre de ne pas avoir été écoutée; lettre que ma hiérarchie vient me mettre sous les yeux en prenant un air de sainte-nitouche. Je prends ensuite la mesure de la capacité de cette candidate à manipuler, quand un infirmier-chef à qui elle demandait de pouvoir accomplir ce pré-stage me relance de lui-même parce qu'elle a prétendu ne pas savoir pourquoi elle devait remettre la compresse...

Ne pas confondre : je forme, je ne soigne pas les bleus à l’âme, ça c’est chacun pour soi. Et ça ne doit pas se faire aux dépens d’octogénaires démunis pour se défendre contre des bisous peu professionnels, comme si c’étaient des bébés à mignoter. Tu parles d'une prise en charge... 

 

Ce genre de motivation, peu ou beaucoup, c’est le ticket direct pour une non-admission. 

Il y a aussi le candidat qui raconte un épisode qui a abouti à son licenciement d’un poste de soignant non-qualifié, en se laissant prendre en otage dans un conflit entre équipe et infirmier-chef, et qui ne voit pas où est son problème, parce qu’il se considère comme une victime, ayant joué au défenseur de tous … écopant au passage du rôle de persécuteur de la hiérarchie avec une lettre fort malvenue.

Le soignant ne travaille pas seul, il bosse en équipe, et au sein d’une corporation aux valeurs d'origine soldatesque – bon à savoir. Tu fous le bordel dans ton unité ? Gare tes fesses, t'as vu Full metal jacket? L'instructeur qui souffle dans les bronches d'un benêt, punit toute l'équipe http://www.youtube.com/watch?v=kVeZ_0ddkr8, qui va latter la pauvre tache ensuite http://www.youtube.com/watch?v=TCNqKrX1sx8 ... 

Ce sera jamais si violent, bien sûr, plutôt de l'ordre de la mise à l'écart; personne ne couvrira ta 3ème connerie, et tout le monde soupirera de soulagement quand tu te barreras, même tes sympathisants.

 

Il y a également ceux qui confondent client commercial et client/patient : le bénéficiaire n’est pas roi, il est prince, c’est bien différent. On satisfait les caprices du premier, alors que le deuxième, on l'aide à s'assumer au mieux – soigner n’est pas obéir ou infantiliser, mais redonner ou conserver l’autonomie.

J’ai vu quelques personnes au passé de vendeur ou de gérant de magasin passer ainsi du mielleux au hargneux en comprenant combien leur discours ne collait pas avec une réflexion professionnelle qui doit passer d’une cible de vente au respect de l’intégrité de la relation. Réactions diverses ensuite : il y a ceux qui mettent fin brutalement à l’entretien, ceux qui laissent sourdre leur colère et deviennent secs devant la tournure prise par la conversation – j’ai même vécu en direct la rupture d’un collier nerveusement tiraillé, avec égaillement spectaculaire de perlouzes dans toute la pièce.

 

Par la suite, en constatant pendant la formation l’effondrement progressif de la façade soigneusement ripolinée lors de l'entretien d'admission, et qui révèle son côté cache-misère à l'usage, il faut parfois négocier le délicat virage de l’arrêt de formation, quand il devient évident que la personne lutte beaucoup trop avec ses représentations pour ne pas se préparer un échec pratique retentissant. Et suivant la pugnacité de la personne, s’attendre à ce que la moindre faille de comportement de la part de l’évaluateur donne lieu, encore, à une lettre aigre ou un téléphone suppliant. Et former, encore une fois, n’est pas sauver les gens d’une situation personnelle qui périclite, si douloureuse soit-elle… mais les préparer à remplir un rôle plus difficile qu’il n’y paraît, dans un pays d’accueil qui a peut-être des valeurs culturelles et communicationnelles à l'opposé de celles avec lesquelles ils se sont construits.

 

Et si l’échec est au rendez-vous en fin de formation, qu’il soit patent (pas de certificat) ou ressenti comme tel parce que la note d’examen était juste passable, s’attendre aussi à des récriminations sur le thème du racisme par exemple, ou évoquant furieusement le règlement de compte avec des archétypes familiaux mal digérés. Pffff... 

 

C’est ainsi… et je me suis rendue compte que si nos messages de formateurs mettent l’accent sur l’authenticité à cultiver avec les bénéficiaires de soins, eh bien suivant le degré d’ "irritabilité sociale" des apprenants, la franchise totale de notre part n’est pas toujours de mise. Louvoyer, je dois m’y faire. Ne pas dire l’évidence, mais laisser la personne y venir toute seule. Ou si elle ne la formule pas elle-même, s’abstenir. Car c’est là que les plus malins et les plus heurtés par la vie prennent la plume pour accuser le formateur, en somme, d’être un mauvais parent.

 

Tout ça, c’était un cap à franchir pour moi : me rendre compte que je suis investie d’un pouvoir - que je l‘exerce ou que l’on me le prête, à tort, avec intérêts surmajorés. Et que même si je suis parfaitement tranquille avec l'idée d'être le mauvais objet de la situation, ma hiérarchie, elle, n'est pas au point pour gérer impartialement les rouspétances. Car elle prend parti régulièrement en faveur des apprenants contre les formatrices, téléguidée par son idéal de justice alors que nous cherchons, nous, à cultiver la justesse nécessaire pour s'adapter au monde des soins, cet étrange univers.

 

Résultat pour 2014, je vais me la coincer sur la forme, tout en n’en pensant pas moins.

 

J’ai vu hier soir « Un conte de Noël », d’Arnaud Desplechin. Une histoire de famille complexe, un frère aîné, mouton noir désigné par une sœur aigrie, laquelle achète à sa famille son bannissement ou du moins le croit. A l’occasion d’un don d’organe entre parents vivants, réhabilitation discutée, calculée et qui permet de mettre sur la table toutes les tensions et les petites horreurs du passé, entraînant au passage le règlement d'autres dettes humaines.

Ce qui m’a surtout frappée, c’est que des gens liés par le sang, par la naissance et par le don de moelle, se disent qu’ils ne s’aiment pas, et sans haine. De manière épidermique, même: ensemble ils font le constat de rejet probable de la greffe, tellement ils sont incompatibles: le fils vient montrer à sa mère les ponctions opérées dans ses hanches, en lui disant le mal de chien que ça fait, la mère réplique en montrant son bras rouge violacé, enflammé, qui laisse présager un syndrome de Lyell http://fr.wikipedia.org/wiki/Syndrome_de_Lyell qui pourrait la tuer plus vite que son lymphome.

 

Faut être solide pour y arriver en famille… déjà que s’il y a un seul lieu où l'ambivalence des sentiments peut éventuellement se transcender, je ne vois que celui-là :- car en amitié, on se perd de vue, on se fâche, bref, on rompt. En amour, aussi. Et donc on peut se quitter. Mais la famille ! Là, c’est le tour de force que de rester harmonieusement désunis…

 

Au boulot par contre, vu qu’on sert toujours un client, et que le fric qu’on reçoit de lui dépend des commandes qu’il continue à nous passer, il y a intérêt à mesurer son honnêteté à l’aune du montant de ses propres factures mensuelles.

Allez, encore 10 ans à tourner 7 fois sa langue en bouche avant de causer. Ou alors, je m’arrange pour n’avoir à faire de ronds-de-jambe à personne.

Quelqu’un aurait-il une recette pour un ticket gagnant à l’Europognon ?

 

Quelle bonne idée, déjà, d’avoir ouvert ce blog, vu que je n’ai plus de vésicule biliaire !

 

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