Bon, mais qu’est ce qui se passe dans l’univers infini ? 2014, année de toutes les résolutions de crise ?
Un ami proche vient de vivre un truc assez spécial, il est venu se confier à moi… sachant que je travaille, comme lui, dans un environnement apparemment porteur de valeurs humaines hautes. Et que j'assiste, tout comme lui, interloquée, à des règlements de compte qui valent leur pesant de cacahouètes en termes de cautionnement de trucs pas trop réglos et de protection de personnes qui manquent à leur devoirs élémentaires, tout en arrivant à éveiller la compassion d'une hiérarchie faible au départ, et aux réserves lentement érodées depuis son entrée en fonction. (Tudieu vidame, une seule phrase pour tout ça... écrivez-moi si vous voulez que je la refasse....)
Il a reçu un avertissement complètement inopiné de sa direction, et a été ainsi désigné comme fauteur de troubles, dans un contexte où il a dévoilé, à bout, une politique de mésinformation qui semble ficeler tous les étages ; et qui tient principalement grâce à la culture du confort personnel de gens tacitement investis de pouvoirs divers, et œuvrant à se tenir à la limite de l’incident diplomatique interne, préservant de multiples petites irrégularités habituellement tolérées dans le contexte de son lieu de travail.
Mais bizarrement, ce n'est pas la mise en cause de la communication qui lui est reproché, mais des broutilles du quotidien, de petites déviances; du genre incident technique isolé qui n'a aucune chance de se reproduire - mais en tous cas ce ne sont pas des comportements répétés à corriger, comme il serait logique de le penser. Un truc sans queue ni tête, un avertissement gratuit, qui ne porte pas à conséquence - mais permet, à peu de frais, de rappeler qui commande. Des montages en épingle grotesques, des assemblages de jacques-et-jean, qu'il a d'abord tenté de démonter posément et avec un sourire vite effacé, devant l'attitude sèche et évitante de son interlocuteur. Avec le recul, il s'est rendu compte que ce n'était probablement qu'une mise en scène de théâtre de faubourg, ridiculement hypertrophiée, une comédie de manifestation d'autorité chancelante et bafouée, destinée à rappeler qui est le maître (parce que Marguerite, on s'en tape).
On en a parlé de longues heures, naviguant entre la charge émotionnelle et l’habitude que nous avons de nous écouter en nous servant de sage-femme l’un à l’autre, au gré de nos parcours de vie.
C’est un homme d’une lucidité extrême, qui voit littéralement, et en technicolor, les trafics d’influences ; mais avec le rien de naïveté qui fait croire trop longtemps qu’il suffit de rester authentiquement dans la recherche de solutions et à se décarcasser pour apporter de la qualité à son travail et de l'aura à l'institution employeuse, jusqu’à ce que l’élément qui se met innocemment en évidence se fasse sévèrement fesser, payant pour ce qu’il dévoile. Et voilà qu’après avoir assisté avec de plus en plus de révolte interne à des manœuvres de protection de personnes incapables mais sachant jouer de leur situation personnelle précaire, ou qu'ils ont soin de dépeindre comme telle, c’est lui qui boit la tasse, parce qu'il déjoue ces stratégies.
Il est solide le gars… il a vu les signes et les symptômes, mais pris dedans jusqu’au cou, il lui a manqué de les formuler – bien conscient finalement qu’il en était capable, mais s’en empêchait jusque là. Car réaliser les tenants et les aboutissants de la toile d’araignée dans laquelle il se débattait l’aurait encollé encore plus dans la confrontation avec ses propres valeurs, le menant plus vite vers la sortie de cet environnement qui lui offre un confort extrême, mais fallacieux ; il semble enfin se résoudre, paisiblement, à donner son sac, pour se préserver. Quitte à retrouver sa liberté de penser, pour ne plus avoir à fermer les yeux sur les maltraitances sournoises, jamais éclatantes, dont il est témoin depuis quelques années: à solliciter continuellement les mêmes personnes pour protéger celles qui démontrent de la faiblesse, les cordes tirées à l'extrême lâchent.
Et en bonne documentaliste, j’ai cherché dans diverses bases de données du domaine psychologique les termes et les descriptions qui pouvaient l’éclairer sur les ressorts compliqués de sa situation.
On a trouvé des choses cruelles, en fait : comprendre un bout mène un peu plus loin, toujours un peu plus loin, la pente s’accentue, ça glisse inexorablement vers une sorte de dimension fatale des rapports humains. Car il est question finalement de la capacité à se tenir en équilibre entre ses propres valeurs et la supportabilité d’entrer soi-même dans un comportement maltraitant, pour ne pas perdre un travail aux conditions confortables; dans l’absolu, lui-même se sent cautionner quelques saloperies dont sa conscience a pu s’accommoder - jusqu’à un certain point. Il y nage jusqu'aux narines, en plein.
Ça parle, entre autres, de l’expérience de Milgram http://fr.wikipedia.org/wiki/Exp%C3%A9rience_de_Milgram, et le choc se révèle assez rude. Il a beau connaître ce syndrome d’obéissance déresponsabilisée à l’autorité, avoir senti qu’il se trouvait dans une géhenne éthique, assistant à des protectorats reposant sur la pitié, se débattant pour trouver comment rester en place dans un réseau moral douteux bien que hautement considéré par les valeurs sociales en cours… le voilà choqué, mais réalisant finalement que pour garder une ligne de conduite en accord avec ses propres valeurs, il lui faut abandonner ce qu’il avait considéré comme le nec plus ultra d’une carrière qui arrive bientôt dans sa dernière décennie.
Ensemble, avec une stupéfaction curieusement calme et allant crescendo, on a mis le doigt sur des notions aussi désagréablement éclairantes qu'un spot de salle d'interrogatoire en pleine gueule. Bon, l’on dit en psychologie que l’on ne réalise sa propre responsabilité que quand on y est prêt… il reste que pour aller mieux et rester la tête haute, il lui faut fuir, carrément.
C’est bien de la maltraitance managériale qu’il arrive à présent clairement à mettre en schéma, en arrachant quelques croûtes qui se remettent du coup à saigner, tachant le beau linge altruiste recouvrant des blessures cachées - ses idéaux, toujours plus érodés de jour en jour.
Il est question de voir protéger des personnes engagées, quelque part, pour leur vulnérabilité et leurs incapacités, conduisant à des erreurs d'appréciation professionnelles. La politique humaine qui consiste à offrir des sursis en invoquant la recherche de mesures visant à réduire les échecs, elle a ses limites. Particulièrement lorsque ces sursis déguisés en cadeaux de tolérance ficellent les coupables par leur indulgence calculée… et les mènent à du silence apeuré et redoutant la sanction.
Il voit bien qu’il se trouve embringué, et fait partie, d’un système de harcèlement institutionnel. Lequel participe d’un art subtil en matière de gestion de l'ensemble du personnel : la violence ne relève pas d'un problème épisodique ou individuel mais d'un problème structurel issu d'une stratégie.
Ainsi, son responsable direct, qui lui a « transmis » l’avertissement venant de plus haut, est en fait un manager télécommandé qui rejette sur d’autres la pression qu’il subit. Et le fait de manière à garder sous la main un collaborateur à qui il est reproché de supposées fautes, qui surviennent à cause de l’incapacité de sa hiérarchie propre, justement, à produire des guide-lines claires - la même hiérarchie qui le sanctionne. Ladite hiérarchie se sentant probablement elle-même en danger de sauter pour avoir manqué de produire ces guide-lines; tiraillée entre l'imprégnation du formatage et ses valeurs humaines, indéniables, qui ne peuvent se concrétiser et se déforment juste assez pour que cette hiérarchie puisse continuer de croire qu’elle agit encore selon une éthique honnête.
Mon pote est arrivé lui-même sur la notion de harcèlement à bas bruit, qui vise non pas à l’exclusion, mais à faire rentrer dans le rang les Cassandre en les violentant psychiquement, en manoeuvrant de manière à les faire prononcer elles-mêmes les termes de leur bannissement d’un ordre moral extrêmement puissant, et en-dehors duquel la "mort" est quasi certaine.
Cassandre, c’est une figure de l’Iliade, une des filles de Priam, roi de Troie assiégée par les Grecs. Elle reçoit d'Apollon le don de prédire l'avenir ; mais comme elle se refuse à lui en échange, il lui crache dans la bouche pour que ses prédictions ne soient pas crues, même de sa famille. Elle voit que Troie sera détruite par la ruse, mais nul ne tient compte de sa clairvoyance – elle est même violée dans un sanctuaire, et ainsi maintenue sous domination psychique - pour qu'elle cesse d'attirer le malheur en l'invoquant, en cassant le moral des troupes, peut-être?
Les personnes harcelées dans le cadre de la maltraitance managériale sont des personnes atypiques ; des personnes trop compétentes ou qui prennent trop de place, et celles qui résistent au formatage. En un temps record, en six mois, il en a vu plusieurs faire ainsi défection, poussées à bout et atteintes dans leur santé, en laissant l'équipe exsangue, privée d'un savoir et d'un savoir-faire tacites qui fluidifiaient la charge de travail. Grippages, merdoyages multiples ont suivi... et les quelques personnes qui venaient combler les trous épisodiquement ont fui devant une désolation compliquant leur travail à l'extrême. La plus résistante jusqu'ici, qui porte littéralement les 3/4 de son bureau sur son dos, a même demandé un licenciement à l'amiable. C'est grave.
Mon copain a vu également la dimension à laquelle son chef direct a peu à peu été réduit; au fil de notre longue conversation, sur plusieurs jours, il a pu décrire un rôle de harceleur sous-dimensionné, mis sous pression depuis son arrivée il y a 3 ans par sa propre hiérarchie, qui subit elle-même d’importantes pressions économiques et politiques de la part de son conseil de fondation et des partenaires contractuels étatiques qui la subventionnent.
Par définition, un harceleur sous-dimensionné, est sans malveillance mais ne comprend pas les rapports humains malgré son effort particulier dans ce sens . Maintenu à peu d'envergure sur le plan managérial tout en endossant un cahier des charges trop lourd pour les moyens dont il dispose, il se fixe et fixe à autrui, en conséquence, des objectifs trop élevés, peine à évaluer les compétences et ne sait pas déléguer.
Et en effet, son chef n’a pas de formation managériale ni de formation en coaching d'équipe; a mis comme priorités pour son secteur des formations institutionnelles prenant un temps de ouf aux collaborateurs déjà pressurés, visant à une cohésion de façade; et, à terme, obéit sans s'en rendre compte à des objectifs voilés émanant de plus haut, visant la destruction de la solidarité d’une équipe aux divers caractères trop bien affirmés et qui fait pièce à la direction générale depuis des années. Jamais il n’a rencontré les membres de son équipe pour faire le bilan de compétences de chacun, mais bien pour leur fixer des contrats de progression dès la première anicroche, posant comme bases que l’employé, quelque part, pouvait bien mieux faire que ce dont il se « contentait ».
Ainsi, par le jeu des pressions fortes subies, ce même chef en devient toxique et dangereux en projetant sur ses subalternes une partie des tensions et des contraintes qu’il endure, en restant dans une zone de manifestation d’autorité qui le préserve de perdre un collaborateur très capable, bien que les directives fournies à celui-ci soient assez imprécises pour générer des erreurs absolument logiques au demeurant.
N’étant pas lui-même formé comme les gens qu’il dirige, ni en ce qui regarde leur profession de base, ni en ce qui concerne leur spécialisation (celle qui fait qu’ils ont été engagés), ni même formé tout court pour occuper son propre poste, il reste étranger aux valeurs de ces deux domaines, et entre fatalement en conflit avec eux vu son manque de formation managériale. Il a juste obtenu de se faire récement adjoindre un demi-poste qui consiste à fliquer les heures de présence, à traquer les différences entre les décomptes d'heures et l'agenda informatique de chacun - l'hypercontrôle, pour donner à des équipiers la sensation d'un qui-vive épuisant pour la loyauté des relations, c'est le toboggan vers la défiance mutuelle.
Mon ami a vu maintes fois comment son chef, pourtant ultra-formé en communication, interprétait faussement des attitudes et comportements en vigueur et valorisés dans ces deux domaines auxquels il est et reste étranger. Notamment, dans l’énoncé des raisons pour lesquelles l’avertissement lui a été notifié, mon pote a entendu, sidéré, une liste d’arguments basés sur des incidents mineurs, qui mis bout-à-bout dans une reconstruction paranoïde, posent comme des évidences des relations de cause à effet tout droit sorties de l’imagination du chef en question. De la barbe-à-papa, de l'air brassé pour se cacher la merde au chat.
Ça s’appelle, toujours en termes de psychologie appliquée, de la projection : une opération mentale par laquelle le sujet expulse de soi et attribue à l’autre des défauts, des sentiments, des intentions qu’il méconnaît ou refuse en lui-même.
La projection des sentiments négatifs permet de se protéger d’affects angoissants, menaçants… et Dieu sait que ce chef tremble probablement pour sa propre place, vu qu’il est lui-même maintenu dans l’insuffisance de remplir son mandat, puisqu’il a été engagé, quelque part, pour ses incompétences… et qu’on lui donne, goutte-à-goutte et de manière régalienne, de quoi penser pouvoir survivre et mener à bien ce pour quoi il a été engagé. Mais toujours en insuffisance, pour le maintenir dans sa zone d’incompétence.
Et à 58 ans, sans réelles qualifications, il doit probablement mesurer qu'il ne lui reste que quelques années tenir avant de jouir d'une retraite qui va être calculée sur ses 5 dernières années d'activité. A dix mille boules mensuelles, avec la perspective de soutenir encore une dizaine d'années un fils aux prétentions artistiques, la priorité semble évidente. C'est ce même chef qui emmène son rejeton au boulot, dans son bureau, parce que ledit fiston de 17 ans, pour pouvoir obtenir son bac et mener sa précoce "carrière" en même temps, peine à respecter son programme vu qu'il est retiré de la filière scolaire et étudie laissé à lui-même.
Lorsqu'un chef se permet des entorses aux moyens de respecter la confidentialité institutionelle, il ne faut pas attendre trop de rectitude morale de la part des subalternes... Mon pote se demande à combien de conversations téléphoniques l'artiste en herbe a assisté, conversations censées rester entre les interlocuteurs, avec des partenaires étatiques ultra-importants pour la survie de l'institution... il y a du foutage de gueule dans l'air.
Ainsi, un processus de clivage peut faire sa niche dans le burn-out que vit ce chef subtilement manipulé – de nombreuses somatisations et arrês de travail allant crescendo; transformation qui lui permet de mettre à distance sa destructivité et de s’en protéger par peur d’être détruit lui-même. En somme, il pense offrir magnanimement à son employé, mon pote, de quoi « se corriger »… tout en le faisant de manière à se l’assujettir, tout comme sa propre hiérarchie l’assujettit lui-même: un vrai petit soldat obéissant et formaté pour exécuter les ordres.
Et d'où un vocabulaire délibérément culpabilisant pour mon copain, en invoquant la "trahison" ressentie alors que son employé se démène pour trouver lui-même une formation continue extérieure, vu qu'il n'arrive pas à se faire remplacer par ce chef pour suivre la formation institutionnelle, et s'est même vu demander de renoncer à une date prévue pour ce faire. Dans un contexte où ce même chef a réalisé quelques semaines auparavant qu'un mandat important, commandité par un partenaire décisif pour accorder les budgets à l'institution, ne pourrait démarrer à la date prévue faute d'avoir cherché des remplaçants alors que ce problème était pendant depuis plus de six mois, perdant de vue l'insuffisance des prestations du coordinateur chargé de veiller au grain et se mettant lui-même dans une merde diplomatique interne et externe assez conséquente... ça prend une saveur amère aux papilles de mon ami.
Le coordinateur en question, manquant sérieusement de l'anticipation et de la pro-activité requises pour mener à bien ses tâches, eh bien mon copain se souvient de l'avoir vu errer dans le secteur en crochetant au passage les collaborateurs pour leur demander si, "par hasard", ce n'était pas l'un ou l'autre d'entre eux qui devait remplacer celui qui avait démissionné l'an passé. Et ceci à quelques jours du début du mandat... ça ressemble à quoi? A du protectionnisme mal placé, sur la tête d'un collaborateur insuffisant. A mon pote qui reçoit l'avertissement, il est même reproché d'avoir harcelé ce coordinateur au détour d'un couloir pour obtenir une précision qui s'est avérée fausse; alors que mon ami se souvient clairement d'avoir libellé sa question sur une feuille imprimée où figurait un mail du coordinateur, et d'avoir attendu 2 jours pour obtenir le renseignement qui l'a induit en erreur; renseignement qui a provoqué de la part du partenaire étatique, concerné par la décision erronée prise suite à ce faux renseignement, un téléphone peu amène au chef, qui a du consacrer une heure à débroussailler la situation qu'il avait lui-même provoquée par son laxisme.
L'injustice et le report, à tort, de la faute sur mon ami... tout ça le révolte et l'indigne. Et puis il semble que les assistantes administratives s'en ramassent "pleinlague" aussi: charges de travail augmentées, et demandes continuelles de mettre un coup de colllier (allééé les boeufs, allééééé les boeufs), parce qu'il y a "des délais" - la secrétaire la plus fiable prononce le terme de Gestapo pour désigner les diverses méthodes utilisées - on les oblige, elles et ses collègues, à être à l'heure le matin, en tolérance zéro; par contre, "on" se fout bien de l'heure à laquelle elles partent le soir pour boucler tout ce qu'il y a à faire en plus. Ambiance...
Pas propre, tout ça. Et en effet, la décision de donner sa démission semble s’imposer pour mon ami. Encore faut-il retrouver un poste équivalent… mais il semble à ce point affecté par sa prise de conscience, qu’il est prêt à se brader momentanément, juste pour échapper à la crise qui l’agite. Histoire de retrouver la paix interne – et ça, ça n’a pas de prix.
En attendant, il me dit qu'après le week-end il est remonté à son travail sur un jour de congé flottant, avec une petite valise à roulettes dans laquelle il a entassé une bonne partie de ses objets personnels, dont une lampe plus volumineuse que la valise, et à l'abat-jour très reconnaissable de tous. Et il est parti à l'heure prévue par sa feuille d'heures dûment remplie... après avoir passé une bonne partie de sa journée à chercher des offres d'emploi, à prendre des contacts, à envoyer des dossiers de candidature.
Tout en se marrant doucement de voir que le flicage continue : par mail et en invoquant la Loi sur le travail, l'équipe est priée de noter sa demi-heure de repas à midi... même si l'on ne prend que son quart d'heure ou même rien du tout, comme lui (qui mange en décalé, et souvent un seul repas par jour, le soir). "Protection de l'employé, mon cul" comme il dit.
Détail piquant: dans le couloir vers la sortie, il croise son chef avec qui ils s'étaient dits bonjour du bout des lèvres le matin - il aurait voulu le rencontrer, il n'y serait pas arrivé!
Il remorquait sa valisette dont l'abat-jour dépassait bien en vue.
Il ne sait pas (et il s'en fout) si le chef a pris conscience du tableau de désertion...
Mort de rire, du coup! C'est bien pour son moral, d'ailleurs même pas trop entamé: une de ses candidatures spontanées a hautement intéressé un employeur potentiel. Et l'a obligé à refaire son CV, donc son bilan de compétences: fâââ, il pourrait prétendre à un poste de cadre consultant... en alignant ses fichiers attachés (CV, certificats, formations qualificatives et continues) à son mail de réponse, il a vérifié trois fois que rien n'était mis à double - ça avait mis un temps de ouf pour se télécharger.
Hé ben rien ne dépassait.
Il va un chouya mieux, le pote. Et il se promet, dès qu'il aura signé une autre contrat ailleurs, de se mettre en congé-maladie jusqu'à la fin de sa période de résiliation de contrat, car en fait, il comprend - avec réticence quand même - qu'il carbure sur le fond de la réserve; peinant à se souvenir que s'il tient le choc, c'est parce qu'il prend, comme moi, du millepertuis. Le voilà passé au Cipralex, la pointure au-dessus; résultats dans trois semaines... il s'accroche. Mais régulièrement ces jours, je m'inquiète en entendant sa toute petite voix morne sur mon répondeur, et de trouver sur mon portable des petits messages d'au secours : "je ne vais pas bien..."
Bon, c’est jour de congé… profitons-en.
La belle journée à vous qui me lisez.