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29 avril 2012 7 29 /04 /avril /2012 15:36

Lourson vient d’avoir 40 ans, Lourson se pose des questions…  et il me demande ça :

« Quel est le chemin de ta vie ? Cela de ta naissance, jusqu'à aujourd'hui et encore jusqu'à la fin de ta vie. »

 

Ah là là Lourson, tu m’en poses, des questions !

 

Mon chemin de vie. Mmmh.

Ben comme ça, brut de décoffrage, cette fois-ci je pense que je suis là pour apprendre la différenciation, sortir de la fusion… quitte à ce que le prix à en payer soit la solitude. Qui finit d’ailleurs par me devenir nécessaire - peut-être même que j’ai toujours été comme ça, mais que je ne voulais pas qu’il soit dit, pour rester en paix avec mon entourage.

Tiens, justement, je sors d'une semaine de séminaire sur la gestion des conflits et la formation des groupes... et je me suis ingéniée à manifester de suite mon individualité, suite à l'entrée en matière quasi-immédiate d'un lourdaud qui voulait absolument me faire la bise d'entrée de jeu, puis m'a asticotée sur mon refus droit direct au premier debriefing... j'ai été récompensée au 4ème jour par la quittance des deux accompagnateurs: la différenciation, c'est ce qui fait la richesse des échanges.

Terrible semaine: je vis mes contacts avec mes frères humains de manière si intense que me calfeutrer chez moi trois jours par semaine devient une nécessité - comme formatrice, je me décrirais en Grand Guignol, face de shamallow, je gesticule, je me déplace pour appuyer mon propos… je sors du cours en nage, et hilare, très souvent. Ca me nourrit, ça me fait du bien. Et j’ai besoin ensuite d’être seule, physiquement parlant : pendant ces jours-là, je démultiplie les contacts sur internet, par contre.

 

Je dirais que mon chemin de vie, c’est aussi de sortir du rôle dévolu aux femmes, enfin je veux dire, qui semblait normal à suivre pour une femme lorsque j’étais adolescente - et pour lequel on m’a quand même préparée. Quoi que je dise, quoi que je fasse, c’est comme une ritournelle qui revenait encore et encore : en quoi ce que je projetais de faire allait m’être utile pour être épouse, mère, et caetera.

Et c’était perceptible comme message principal même si l’on acceptait quelques incongruités dans le paysage : la cuisine ne m’intéressait pas, j’étais avide de sensations fortes, j’aimais bricoler… ce qu’on me tolérait car j’étais arrivée à la place du garçon attendu – mon père, je crois, était fier d’avoir une fille aventureuse, dans le fonds, qui se fichait pas mal d’avoir quelques bleus, les cheveux en bataille et un look androgyne.

Ma mère avait pu reprendre ses études quand nous étions entrées à l’école ma sœur et moi, passer son bac du soir et aller assez loin dans ses études de droit ; mais mon père lui avait dit que c’était à condition que la vie de famille n’en souffre pas – c’était pas gagné de suivre sa propre voie sans être au service des autres, pour une femme de sa génération. Alors que ses copines de fac n’avaient que dix ans de moins, et recevaient, elles, campo pour vivre leur vie, pour la plupart.

Bref, j’ai eu à finir de faire la trace de la liberté malgré mon sexe. Et comme je suis de nature un peu âpre, le ton a suivi, et je peux dire que cela a été au prix de passer pour une chieuse. Alors que la même liberté de ton chez un garçon et un homme, c’est « savoir ce qu’on veut », une fille qui refuse de s’adapter aux besoins de son entourage - surtout masculin – reçoit le message de ne pas s’étonner si elle ne trouve pas de compagnon… Comme une sorte de chantage social, et je ne saurais pas l’expliquer mieux, en tous cas pour le moment.

 

Un autre aspect de ce même chemin de vie est en rapport avec ma profession première. Je ne l’ai pas choisie parce qu’elle m’attirait, mais parce qu’elle représentait un ticket de survie et d’indépendance face à une famille explosée et devenue peu accueillante. Alors que mon projet d'études initial devenait un poids plus qu’autre chose, la perspective d’être rémunérée pendant trois ans passés à devenir infirmière a été le déclic majeur de ma décision.

Alors que ce boulot déchaîne les remarques sur la vocation et autres conneries d’images d’Epinal, je me suis fait un devoir de détromper quiconque cherchait à venir me pomper l‘air avec ses propres problèmes. Je tirais aussi une certaine fierté d’avoir une vie privée pleine de personnes et d’endroits marginaux notoires, contrastant avec la blouse blanche et le badge d’élève-soignante.

 

Voilà, Lourson, je ne sais pas si j’ai répondu à ta question, tu comprendras pourtant certainement pourquoi j’ai mis tant d’énergie à vouloir te détromper sur la personne que tu semblais imaginer dans tes propos, lorsque notre histoire se bâtissait.

 

Maintenant, tu es le bienvenu si d’aventure tu me prenais pour témoin de ce qui est en devenir chez toi, de ce que tu pressens toi-même pour la suite – car ta question de départ, je sais qu’elle s’adresse autant à toi qu’à moi.  

 

Raconte...  tiens-moi au courant, c'est un moment pour baisser les voiles, le temps de décider de la direction qu'on souhaite prendre, après s'être laissé porter par les événements. Un moment pour reprendre son sextant, son compas, et ouvrir les possibilités de tailler d'autres routes.

 

Et vogue, sur la belle mer salée, quitte à se prendre encore quelques embruns en gueule - ça réveille!

 

Et... bon anniversaire encore une fois, ma peluche.

 

 

 

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commentaires

C
Quelques mots clés sur Google sur "qui je pense être, qui je suis et celle que les autres pensent que je sois" et... Je découvre cet article bloguesque.<br /> Vous êtes quasi moi ^^ ça me parle, je m'y retrouve, je me sens moins extra-terrestre ou alors nous venons de la même planète, allez savoir...<br /> Belle plume et belle affirmation de soi, merci pour ce chemin de vie (qui, si il sent la noisette, montre que malgré les marrons et les glands croisés, on peut arriver à ne plus trop s'y perdre et<br /> à suivre sa propre voie)...
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