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29 octobre 2016 6 29 /10 /octobre /2016 11:25

Me voilà dans un conflit de loyauté, du moins en apparence.

 

Au terme de quelques remplacements dans une unité-antenne de soins à dom’ fraîchement ouverte dans un bloc d'appartements protégés, je découvre bug après bug.

C’est un peu normal, le matériel n’est pas toujours au rendez-vous, il faut prévoir plein de petits détails ; déjà que plein de petits détails, justement, ne collent pas avec l’ancien système…

Des boîtes à clé dont le code est faux ; et qui par ailleurs est trop universel pour être sécure.

Des aguillages de noix sur bâton, comme le fait de devoir se servir de cette clé pour ouvrir une porte d’immeuble, mais de devoir coincer son sac de soins dans ladite porte, pour aller reporter trois blocs plus loin la foutue clé dont une collègue pourrait avoir besoin dans l’intervalle. Pour revenir ensuite trois blocs plus loin et poursuivre ma tournée.

 

Des choses en somme qui peuvent et doivent être ajustées.

 

Mais… la collègue qui reprend le montage de cette unité, au vol, mélange allègrement fautes personnelles et flou artistique des débuts.

Me demande de lui faire une liste des choses à corriger, sans passer par la voie normale, prévue pour déléguer le règlement des problèmes à la référente – une transmission clinique par l’application qu’on utilise pour réguler les soins, et atterrit dans le panier de réception du responsable d’équipe, qui retransmet ensuite à la référente des dossiers…. qui se trouve justement être cette fille, qui remplace les deux référentes (une en vacances, l'autre... je ne sais pas - mais de toute façon les deux à temps partiel). Remplaçante qui assure soit la consultation au sein du bureau de la même antenne, soit des visites comme moi, et souvent doit jongler avec les rares temps morts que lui laisse la consultation pour régler ces foutus problèmes qui transitent par moi, puis par le responsable d'équipe, pour être réglés. Complexe, hein? Déjà que pour vous le décrire, je sue; alors pour que vous le compreniez, c'est sûrement pas de la tarte.

 

J'en suis venue à penser qu’elle me demande de manière implicite de couvrir ses erreurs, en fait. Certaines compréhensibles, comme un rafraîchissement de page de l’application, qui ne se fait pas malgré son intervention suite à ces retransmissions (la technologie est fragile, quand même). D’autres, plus conséquentes, comme de corriger une médication sans se référer aux ordres médicaux mis en pièces jointes, simplement parce qu’elle a un médicament à la place d’un autre dans les réserves du client; toutefois, en vérifiant par téléphone au médecin ce qu'elle pense être juste. Je m'étonne qu'elle n'ait pas encore capté que seul un ordre écrit est valable... ne serait-ce qu'histoire de se protéger. On en est là: se protéger.

Au passage, le temps manque pour corriger toutes les petites remarques caduques qui entravent encore la bonne marche du service ; comme de repérer l'inutilité d'acheminer une balance chez un client pour le peser, alors qu’il est de notoriété publique qu’on ne peut le peser avec cette balance, qui ne va que jusqu’à un nombre de kilos standard. Or si un ordre médical est donné de surveiller ce poids, pourquoi ne pas soulever le lièvre en faisant une transmission clinique pour évoquer la nécessité d’informer le médecin qu’on ne peut surveiller ce paramètre ? Se protéger, toujours la même idée. C'est vrai qu'elle devrait elle-même prendre le téléphone, au final. Alors elle essaie de corriger le tir sans que le responsable ne s'en aperçoive. Mais si elle fait tant de fautes elle-même, je comprends qu'elle ne fasse plus la différence entre cacher ses erreurs et mettre en évidence ce à quoi la situation l'accule. Visiblement, le système déconne: une visite a sauté parce qu'elle n'était pas mise au planning, et comment cela peut-il arriver sinon par erreur de programmation? Donc faute humaine? Faute de programmation, ou oubli de la planificatrice? Qui elle-même n'est là qu'à temps partiel, ou en vacances, donc son taf est repris par une planificatrice qui est à distance.

 

De plus je la vois trier de bizarres priorités en me les déléguant … comme de prendre du temps non-prévu, mais qui devrait faire l’objet d’une planification, pour aider un client à trouver un médecin moins difficile à atteindre que le sien - mais comment je justifie ça? Elle pense que comme le client aura déjà fait ce qu'on doit venir contrôler, on aura du temps pour chercher un médecin pendant cette visite. Elle semble trouver normal de consulter ses plannings la veille de rentrer de congé... mais c'est pour se faire un programme non-officiel de choses à faire en plus du reste… elle s’épuise à prendre seulement un quart d’heure pour manger son pic-nic sur le coin d’un bureau, sans opérer la nécessaire coupure de midi… et finit à point d’heure, crevée et démultipliant les conneries supplémentaires. Il n'y a même pas de cafétéria disponible pour réchauffer un repas ou se faire une boisson chaude, ou juste poser son popotin quelques minutes.

 

Ce tableau met en évidence que selon des règles tacites et pour protéger la situation, cette fille et les clients, je devrais trier dans ces transmissions cliniques ce que je vais traiter comme infirmière de terrain remplaçante déléguant systématiquement, donc quelque part informant le responsable d’unité de tout ce qui ne joue pas, parce qu’elle ne peut pas être sur tous les fronts… et ce que je vais traiter en collègue compatissante rattrapant au vol les bêtises de ma collègue en exerçant dans l’ombre un semi-rôle de référente, non-clarifié avec les RH, en ces temps troublés de début d’unité.

 

Pire encore, au fil des échanges avec le responsable d’équipe qui est à distance, je mets en évidence des erreurs commises par l’unité de base – sachant pourtant très bien qu’il est inévitable que ces bugs surviennent : ce job comporte tant de choses, de détails auxquels penser, dans un contexte de manque de personnel chronique et d’ores et déjà signalé aux RH, que cela ne peut qu’arriver. J'ai l'air de quoi, moi... la grande délatrice justicière... exactement ce que je ne veux plus assumer, en pleine conscience et depuis deux ans.

 

En appelant le responsable d’équipe pour proposer mes services de personne apte à corriger dans l’application ce qui doit l’être, parce que pratiquant cette application régulièrement… mais démunie d’identifiant et de mot de passe qui me permettrait de le faire… j’ai semble-t-il attiré son attention sur des erreurs consenties en entente d’équipe, car tout le monde connaît certains détails mais les thésaurise... et mettant finalement ces mêmes équipiers en difficulté, non pas parce qu’elles sont commises (personne ne meurt de tout ça) mais parce que ça dévoile à quel point le système est bancal, en comptant sur trop peu de gens pour trop de choses à traiter, et nécessitant finalement des visites en semi-urgence, en plus de ce qui est prévu, pour corriger in extremis des erreurs idiotes, résultant d’une situation qui empêche tout le monde de sortir le nez du guidon. Avec une fois ou l'autre, je pense, le risque de sortie au grand jour d'une grosse connerie qui amènera quelqu'un aux urgences. Déjà que ma dernière transmission a fait mettre le doigt au responsable d'équipe, sur la médication d'un client, qui précarise ses fonctions métaboliques en le sous-traitant!

 

La semaine prochaine, il n’est pas prévu que je travaille là-bas, les deux référentes habituelles qui gèrent la consultation parallèle à l’unité seront à nouveau là – elles pourront reprendre le fil… mais avec le danger soit laisser des erreurs se perpétuer encore, soit de s’épuiser en bossant 10 h par jour parce que prenant toujours plus sur elles-mêmes ; au point de se trouver devant le dilemme stupéfiant de devoir choisir entre faire le boulot supplémentaire... ou prendre une pause, cumulée avec l'expédition consistant à aller se chercher quelque chose à manger à un quart d’heure à pied, pour tenter de faire d'une pierre deux coups: la ventilation du cerveau nécessaire pour reprendre le collier, et l’acquisition d’un pic-nic froid. Mangé en marchant sur le chemin du retour.

Bref, je retrouve une situation bien trop connue : se foutre en l’air en s’occupant d’autrui, et pour finir risquer sa place à force de vouloir tout faire sans en avoir les moyens.

 

Rien de ce qui est nécessaire pour faire la job n'est pleinement en place: cahier des charges flou, insurmontable ou les deux / outils défaillants, et encore heureux s'ils sont disponibles (je fais comment pour trouver le portable sur lequel on est censé pouvoir m'atteindre, si aucune de ces trois dames n'est présente?) / reconnaissance de statut, et là, on est les quatre dans une brume assez pénible.

 

A moi de prendre mes distances, et de faire un maximum sans m’épuiser… et pour les remplacements à venir,je vais devoir dire, quand on me rappellera pour pouvoir redonner des heures supplémentaires aux collègues (ha ha), que ça ne me va pas de m’arrêter trois heures au milieu de la journée, pour finir à une heure qui m’empêche d’aller à l’Aquagym, alors que ma hanche en a foutûment besoin. Entre ça, ou manger sur le pouce en marchant ou en tapotant sur un clavier, je ne vois pas de différence fondamentale : c’est une atteinte à la vie privée, et une captation d’heures déguisée.

 

Féchié d’être con. Et d’être infirmière, franchement.

 

En plus, la collègue qui cumule les erreurs est dans le même cas que moi : elle a abandonné un poste de référente parce que là, ce rôle montre à quel point c'est devenu une galère monstrueuse avec l'introduction d'une technologie censée, justement, minimiser les risques d'erreurs – tout sauf un exemple.

Mais alors qu'en optant pour du travail d'intérimaire, j'ai pris les moyens de ne plus m'embarquer qu'en spectatrice impuissante au lieu de rester actrice participant aux conneries, voilà que la vie me ressert la même caque : je vois mes collègues carburer au-delà de leurs forces, en se préparant un méchant burn-out, assorti ou non d'un gros bug de prise en charge qui les mettra sur la sellette...

Car c’est vite vu: on ne cesse de recommander aux clients de freiner, aux proches aidants de penser à eux, de ne pas adopter de comportement qui les mine tout en ayant l’air d’être le meilleur et le mieux investi… mais nous-mêmes on se retrouve à faire juste le contraire.

Bonjour les cornettes sans Jésus en pool de soutien !

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