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14 mars 2015 6 14 /03 /mars /2015 07:05

 

 

Eh bien voilà… comme mon collègue avait annoncé son départ pour fin mai, j’ai jugé loyal d’informer la hiérarchie directe et l’équipe que j’allais les quitter tôt ou tard. Sur 6 personnes se répartissant 4, 3  emplois plein temps, 2 qui s’en vont dans un court laps de temps, c’est rude : autant les préparer.

 

 

Et puis ça pouvait servir, va savoir : avant d’apprendre que le collègue s’en allait, je me disais que je ne parlerais pas de ce qui me prend le chou, mais d’une opportunité rare qui m’était offerte ailleurs.

 

Pourtant, informant les uns et les autres, je m’aperçois que l’équipe a perdu deux emplois plein temps de facto, avec l’entrée en jeu de la fameuse et foutraque application informatique ainsi que la centrale d’appel et d’ouverture des dossiers, et l’émergence des évaluateurs spécialisés. Donc ni mon poste ni celui du gars qui s’en va n’ont été une augmentation de personnel, mais l’échange de deux plein temps par deux 80 % du nombre minimal de soignants référents : il manque bel et bien presque un temps partiel à 50%...

 

J’apprends aussi que les motivations à devenir des évaluateurs reposent en partie ou au complet sur le fait de ne plus fonctionner comme référent, tellement la charge est devenue lourde…

 

J’apprends qu’un collègue thérapeute se frotte les mains, et il a raison, de ne plus pouvoir être référent - merci la loi – discours tordu s’ensuivant : il renvoie même les taches de  vérification du matériel aux infirmières, puis se flatte de « dépanner » quand elles lui sont réattribuées (30’ prévues pour vérifier que c’est bien toujours les mêmes personnes qui vont pouvoir venir relever le client après une chute ; presser le bouton d’alarme, entrer en contact avec la centrale d’appel pour voir si tout fonctionne, et cela autant de fois que nécessaire, vérifier tous les téléphones de chaque appartement…  reporter les changements dans le dossier informatisé…) ; précision : c’est le même bonhomme qui quand il nous voit galoper, nous fait signe des mains qu’il faut être « cool-cool ».

Je t’en foutrai, moi, du koulkoul.

 

Donc les références se transfèrent sur les infirmières, ben tiens. Qui par ailleurs se voient encore attribuer des petites choses en soi, mais qui cubent à la longue : papiers à faire signer, documents autorisant la consultation de leurs dossiers par les instances, pour avoir des subsides de repas. Et c’est pas 5’, hein… c’est le quart d’heure qu’il faut, carrément, pour expliquer à la personne finalement que si elle ne signe pas, ben on ne la soignera pas.

 

La fameuse spécificité des soins infirmiers se dilue de plus en plus dans une sorte de poubellisation des problèmes-et-des-petits-riens-à-régler dans la boîte de la femme-à-tout-faire : Conchita s’en chargera.

 

 

Je deviens une femme de ménage informatique, comptable, qui règle ce que les autres n’ont pas pu ou pas su faire, plus particulièrement ce que ses remplaçantes ne font pas, comme travail administratif. Je n’aï rien contre le fait de le faire à leur place, mais qu’on m’en donne le temps, bon Dieu de bois !!! Deux semaines de vacances équivalent à une demi-journée pleine pour tout encaisser. Et à qui on demande des comptes quand ce n’est pas fait… alors qu’on devrait la remercier d’avoir vu que ce n’était pas fait ! Car le système a des trous noirs ici et là : ce n’est pas parce qu’on pose une question par mail automatique à la personne qui traite les urgences du jour, qu’on va forcément recevoir une réponse…

 

 

Ça ne date pas d’hier, ce sentiment que nous sommes régulièrement en train de rattraper le verre de cristal avant qu’il ne se fracasse par terre.

 

Certains collègues me racontent d’édifiants épisodes du même genre, et j’en suis effarée parfois. D’autres me balancent des appréciations-boucliers de super-diagnostiqueurs à la petite semaine : c’est pas une surprise, on voit que tu es mal, etc, etc. Communication malhonnête et auto-gratifiante : l’usage du « on » suggère que tous les autres pensent et disent la même chose… et ce « tu » accusateur, comme si j’étais incapable de m’adapter (alors que c’est mon fonds de commerce depuis 25 ans à présent, l’adaptabilité !), quand des dizaines et des dizaines de petites choses s’accumulent, faisant glisser le rôle de référent vers un panier toujours plus chargé et débordant.

 

 

De nombreuses petites erreurs informatiques  s’ensuivent… car je suis dans une telle colère devant tout ça que je refuse de me laisser intoxiquer : si j’ai le choix entre une indigestion et avoir faim, je préfère ne pas bouffer ! Or on me propose juste un Alka-Seltzer géant pour faire passer le rata…

 

Mais ce qui m’inquiète plus, c’est que mon état de santé depuis un mois me fait faire des erreurs de  débutante : moi qui ai l’habitude de corriger le tir dans la foulée, je régresse. J’entends les sons comme à travers du coton et je réagis avec un temps de retard, redemandant ce qui vient d’être dit si j’ai eu plus de deux infos à la fois – je le sais, la personne malentendante a souvent l’air de ne pas avoir inventé le fil à couper le beurre. L’air, juste l’air, car c’est la chanson qu’on lui chante et la manière dont on la lui chante  qui lui fait endosser le rôle du benêt !

 

Je ne supporte pas mon plus que l’une de mes responsables me reproche de lui faire répéter ce qu’elle vient de dire, à son idée… comme formatrice, je peux le dire, pour faire passer un message, il est préférable de se préoccuper des possibilités de compréhension du destinataire du message plutôt que de s’obstiner à répéter la même chose de plus en plus fort.

 

Et constater que je me plante dans une prise de sang en remplissant le mauvais tube, ou que j’oublie simplement de faire un autre prélèvement avant de l’envoyer au labo… ça, c’est le pompon.

 

 

Je suis allée voir ma daktari… comme de juste, antibios et arrêt-maladie. Plus un spray nasal à la cortisone pour faire désenfler mes trompes d’Eustache entre autres, histoire de me faire émerger du brouillard auditif. Et de l’échinacée pour me renforcer.

 

Mais la meilleure prévention, c’est quand même de m’éloigner de la source…

 

 

 

La dernière personne que j’ai avertie, c’est ma collègue préférée, qui m’a introduite ; on s’est longuement parlé au téléphone, et il en est ressorti que pour une fois que l’équipe disposait de l’avis d’une personne qui avait une vision-flash de la situation (5 mois, quand même…)  – les anciennes ayant absorbé tous les petits changements les uns après les autres et s’étant en somme habituées à prendre des kilos en douceur – et bien il serait opportun de demander à notre cheffe un colloque consacré à nos problèmes d’équipe, pour poser les choses, et chercher des solutions ; même si on sait que cela reviendrait, pour à peu près tous les problèmes, à demander un poste supplémentaire. Je lui ai dit que je n’allais pas faire la locomotive, puisque je partais sur d’autres rails, mais que c’était l’équipe en place qui devait bouger et arrêter de tabler sur le fait que « on » et « ils » se rendent compte de notre situation. Je participe volontiers tant que je suis là, point.

« On « et « ils » sont des personnes, avec des fonctions, et personne ne va aller pour toi faire les courses si tu ne le demandes pas, car personne ne peut savoir que ton frigo est vide et que ton estomac crie misère, puisque tu te contentes de miettes et que ça a l’air d’aller quand même…

 

On va bien voir à mon retour le 26, si quelque chose a avancé.

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